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Une filière caprine plutôt solide

Les élevages caprins (et ovins) sont-ils suffisamment durables ? Un programme de recherche européen vient de livrer ses premiers résultats.

La résilience économique des élevages français est globalement meilleure que celle de ses voisins européens. Le programme de recherche européen Isage(1) a permis d’étudier et de comparer la durabilité des filières caprines et ovines au sein de 7 pays de 2016 à 2020. Premier constat de cette étude, il y a « peu de différences » de durabilité, en France, entre les différentes filières de petits ruminants (ovins viande, ovins lait, caprins lait), relève Emmanuel Morin (Institut de l’élevage). La résilience économique se situe en moyenne à 4 (sur 5), un chiffre au-dessus de la moyenne européenne (3,6). La gestion du bien-être animal fait légèrement mieux aussi (4,2 vs 4,1 en Europe) grâce au très bon score obtenu par l’alimentation (4,5 vs 3,9), alors que des notes inférieures à la moyenne européenne sont obtenues pour le logement (4,2 vs 4,4) et l’expression des comportements naturels des animaux (3,9 vs 4,2). La France fait moins bien que ses partenaires en matière de diversité des systèmes agricoles (2,5 vs 2,7) en dépit d’une plus grande diversité des cultures (3,8 vs 3,5) et des modes de commercialisation (2,9 vs 2,8). L’explication est double : une moindre diversité animale (1,6 vs 2,2) et une activité de transformation à la ferme moins fréquente (1,8 vs 2,5).

Autant de fourrages ?

Autre composante de la résilience, la capacité d’adaptation des filières ovines et caprines au changement et au réchauffement climatique, lequel a déjà atteint 1,5°C en France entre 1901 et 2017. À défaut de mesures d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre, l’écart pourrait atteindre 6°C sur certaines parties du territoire à l’horizon 2100. Or, le réchauffement peut avoir d’importantes conséquences sur les cultures fourragères, sur les animaux et, in fine, sur les systèmes ovins et caprins, explique Aurélie Madrid (Idele). Dans le sud de l’Europe, la hausse des températures et la diminution des précipitations attendues devraient conduire à une baisse de la production fourragère. Plus au nord et en montagne, la hausse des températures et des précipitations devrait au contraire favoriser la pousse, avec une nouvelle répartition sur l’année. Une simulation Climalait(2) pour la Charente laisse attendre une « avancée du démarrage en végétation et donc de la mise à l’herbe et des stades optimaux pour la récolte, mais un creux en été de plus en plus marqué, en partie compensé par la reprise en automne ». Le changement climatique a également un impact sur la qualité des fourrages. Une concentration accrue en dioxyde de carbone (CO2) n’a « pas d’effet sur la digestibilité » de la plante. En revanche, conjuguée à une hausse de la température, elle favorise les espèces fixatrices d’azote (légumineuses) tout en réduisant la production de protéines chez les non-légumineuses. Aurélie Madrid propose cinq pistes d’adaptation : « associer graminées et légumineuses dans les prairies, limiter le labour, bien gérer le pâturage, utiliser des coproduits dans l’alimentation des animaux, sélectionner des variétés adaptées. »

Les impacts zootechniques du stress thermique sont eux aussi nombreux (augmentation de l’abreuvement, diminution de la prise alimentaire, de la productivité et de la fertilité, développement de maladies infectieuses, moindre qualité de la viande) même si « de nombreux facteurs jouent sur la sensibilité des animaux : les paramètres météo (température, humidité), le stade (gestation, lactation…), le statut nutritionnel, la génétique (couleur, laine, taille…), l’environnement. » Aurélie Madrid propose, là encore, plusieurs pistes d’adaptation : création de zones ombragées, ventilation, augmentation de l’espace disponible par animal, sélection d’individus plus résistants, adaptation de la ration, adaptation de la gestion de la reproduction.

Revoir les schémas de sélection ?

En parallèle, le projet iSAGE a étudié la variabilité génétique des caractères de production en fonction de la température lors de leur mesure. Conclusion : « au niveau d’une population étudiée (ovine ou caprine), nous n’avons pas pu mettre en évidence d’effet significatif de la température sur les performances . En revanche, nous avons pu montrer que les animaux ont des potentiels génétiques qui s’expriment différemment en fonction de la température », résume Hélène Larroque (Inrae(3)). Dit autrement : « Le potentiel génétique d’un animal n’est pas le même selon la température. »

Question, l’évaluation génétique actuelle, qui tend à sélectionner un animal adapté aux différents systèmes d’élevage présents en France, est-il adapté ? « Oui, mais », répondent Diane Buisson (Institut de l’élevage) et Isabelle Palhière (Inrae), au terme d’une analyse portant sur 432 troupeaux caprins choisis dans les principaux bassins de production (races Alpine et Saanen). Il apparaît néanmoins un « reclassement » entre les élevages fromagers du Sud-Est et ceux du Grand Ouest. Une conclusion provisoire qui demandera à être vérifiée sur un plus gros jeu de données.

Benoît Contour

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