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Graines germées et autonomie alimentaire

En Vendée, Les associés du Gaec La Louise Anne misent sur un concept innovant de distribution de graines germées (féverole, soja…) à leur cheptel caprin. Un premier pas vers l’autonomie alimentaire qui reste à être pleinement transformé en investissant dans des cellules de stockage.

Les bienfaits des graines germées sont connus par la plupart des éleveurs. Reste à appliquer ce principe en exploitation. « Depuis 2015, nous avons sauté le pas et investi 150 000 € dans un dispositif entièrement automatisé pour assurer la distribution de graines germées à nos 850 Alpines , explique Raphaël Boisliveau, l’un des deux associés du Gaec La Louise Anne. Nous nous appuyons sur un système comportant plusieurs cellules reliées entre elles par un automate. Les graines sèches sont trempées dans de l’eau puis séchées. Le nombre de cycles de trempage et de séchage et leur durée sont pilotés automatiquement. Nous modifions le paramétrage en fonction de la température et de l’hygrométrie. Plus il fait chaud, plus la germination est rapide ». Le dispositif consomme quotidiennement entre 1 200 et 1 500 litres d’eau. Cette eau provient d’un forage et est “traitée” avant utilisation. En ce mois d’avril, le mélange de graines à germer se compose de 30 % de féveroles, 25 % de pois, 20 % de soja, 15 % de maïs et 10 % de blé. À ce jour, seul le soja est produit sur l’exploitation. Les éleveurs vendéens n’ont pas encore investi dans des cellules leur permettant de stocker les graines autoproduites. En attendant, « nous faisons appel à un négociant qui valorise notre soja et nous prépare le mélange ». La partie germination est entièrement automatisée et ne requiert aucun travail supplémentaire. Selon les années et la qualité des fourrages récoltés, ce mélange de graines germées peut être incorporé dans la ration à hauteur de 500 à 1 kg/chèvre/jour. « Cette année, nous en distribuons 500 g par jour en complément des 3 kg d’ensilage de maïs, 900 g de foin de luzerne, 300 g de soja, 150 g  de correcteur azoté, 150 g de pulpe de betteraves et 100 g de maïs floconné ». Cette stratégie leur permet de réduire la distribution de concentrés de production. Pour cette campagne, le mélange de graines a été acheté au tarif de 358 €/t, une jolie économie par rapport à un aliment type VL 2 l. Selon les années, l’économie générée est comprise entre 40 et 60 €/t. Sachant que l’élevage se fait livrer environ 230 t de ce mélange de graines, l’économie induite reste importante.  « Depuis l’installation des équipements en 2015, nous n’avons pas connu de difficultés techniques majeures et ce, même si entre-temps le constructeur a déposé le bilan. Le mécanisme reste simple ». Chaque jour, la ration est distribuée à l’aide d’un godet désileur, l’éleveur incorporant au préalable l’ensilage de maïs, la luzerne et les graines germées. Cette ration semi-complète est ensuite distribuée aux chèvres qui reçoivent le reste des concentrés via un robot distributeur.  

QUELS SONT LES INTÉRÊTS DES GRAINES GERMÉES ?

Les bienfaits de l’orge germée sont connus et reconnus depuis longtemps en élevage. La germination confère en effet un bénéfice nutritionnel non négligeable. Le niveau des acides aminés assimilables en sort notamment fortement augmenté et les nutriments deviennent plus digestibles. Sécurité digestive, renforcement de l’état général et de la production laitière sont autant de bienfaits constatés par les éleveurs. La germination contribue de surcroît à transformer l’amidon en sucres solubles (maltose et dextrose), très rapidement assimilables. Les protéines sont décomposées en molécules beaucoup plus simples laissant apparaître de nombreux acides aminés fortement assimilables et utiles à la fixation des vitamines. En conséquence, la teneur en vitamines augmente de manière significative : vitamines A, B1, B2, biotine, PP, vitamine E et même vitamine C ! Les graines germées sont également riches en minéraux (fer, magnésium, calcium, potassium et cuivre).

L’AUTONOMIE EN LIGNE DE MIRE

Les associés du Gaec vendéen ont entrepris d’autres actions pour rechercher l’autonomie. Ils ont ainsi misé sur Bactériolit, un procédé développé par la Sobac, société aveyronnaise qui propose des solutions naturelles pour améliorer la vie et la fertilité des sols, des plantes et des animaux depuis plus de 30 ans. Bactériolit permet de mieux valoriser les fumiers de l’exploitation. Il apporte des micro-organismes alors que beaucoup de ses concurrents se limitent à un apport en oligoéléments et en nutriments destinés aux bactéries et autres protozoaires du sol. Bactériolit reconstitue la microflore et la microfaune qui se multiplient et améliorent la composition du sol. De ce fait, la teneur du sol en matières organiques augmente. Les micro-organismes végétaux se développent en absorbant les excès de nitrates qu’ils vont incorporer à leur propre matière organique. Le foisonnement des micro-organismes végétaux absorbe et fixe les nitrates et autres sels minéraux (ainsi d’ailleurs que le carbone) qui sont ainsi soustraits au lessivage et ne sont plus entraînés dans les nappes. Tout cela a un effet positif sur la structure du sol et va permettre à la matière organique de bonne qualité (l’humus) d’augmenter « Tous les mois, nous appliquons le produit sur la litière des chèvres et cela nous permet de réduire les apports d’azote. Le fumier se décompose mieux et les plantes développent un meilleur système racinaire », souligne l’éleveur. Bactériolit augmente la valeur fertilisante des litières tout en réduisant les odeurs. Son usage en bâtiments d’élevage diminue considérablement les émissions d’ammoniac et contribue à la santé et au confort des animaux et des éleveurs.

ERWAN LE DUC

EN CHIFFRES…

LE GAEC LA LOUISE ANNE ((pointez vers Aizenay Vendée))

  • deux associés (Philippe Praud et Raphaël Boisliveau) et un salarié à temps plein ;
  • une SAU(1) de 220 ha, dont 85 ha de blé, 32 ha de maïs ensilage, 18 ha de luzerne, 20 ha de prairies naturelles, 15 ha de tournesol, 15 ha de soja, 30 ha de maïs grain et 5 ha de prairies permanentes ;
  • un cheptel de 850 Alpines ;
  • une production moyenne de 980 litres /chèvre ;
  • un TB(2) de 40 g/kg et un TP(3) de 32,6 g/kg ;
  • le lait est collecté par Lactalis ;
  • un prix de base pour février 2022 de 678 €/1000 litres.

 

UN PROCÉDÉ EN QUATRE ÉTAPES

Le procédé s’appuie sur un dispositif comprenant six cuves dans lesquelles les graines subissent plusieurs phases de trempage et de séchage qui déclenchent la germination. En amont de la germination, l’eau collectée grâce à un forage a été purifiée et désinfectée à l’aide d’un traitement reposant sur le principe de l’électrolyse.

L’orge est d’abord trempé pendant 24 heures pour faire sortir la graine de sa période de dormance. Cette phase de réveil biologique est connue sous le terme de prégermination. Pendant la période de germination, les radicelles vont atteindre la taille du grain. C’est durant cette période que l’énergie potentielle contenue dans la graine va être transformée en énergie et nutriments bénéfiques pour l’animal : transformation de l’amidon en sucres simples, des protides en acides aminés, des lipides en acides gras et démultiplication des vitamines ! La valeur alimentaire reste complexe à déterminer car aucun laboratoire ne dispose d’outils pour déterminer la valeur alimentaire des graines germées. L’éleveur pilote sa ration en suivant plus particulièrement l’évolution du taux d’urée dans le lait pour jauger la quantité d’azote soluble de la ration.

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